La localité enregistre avec acuité ce problème, et le nombre effarant de demandes non encore satisfaites est la parfaite illustration d’une situation qui perdure.
Presque quotidiennement, des scènes d’effervescence se déroulent devant ou à l’intérieur des sièges de daïra, provoquées par des citoyens venus réclamer l’attribution de logements devenus leur obsession. Ces citoyens, en majorité des femmes, sont prêts à tout tenter pour parvenir à leurs fins. “J’ai déposé mon dossier en 2011, et à ce jour la commission de daïra ne s’est pas déplacée pour effectuer l’enquête sociale sur la base de laquelle elle arrête la liste des bénéficiaires”, a indiqué Bahia, divorcée et mère de famille.
Des chefs de famille accompagnés de leurs enfants campent devant les daïras et se disent prêts à s’exposer à tous les risques, y compris le suicide, si leurs revendications ne sont pas satisfaites. Il y a ceux qui occupent des tentes dressées sur les trottoirs ou la chaussée, bravant les aléas de la météo. La ville de Mascara enregistre avec acuité le problème du logement, et le nombre effarant de plus de 20 000 demandes non encore satisfaites est la parfaite illustration d’une situation qui perdure.
Certes, force est de reconnaître que des efforts considérables ont été consentis en ce sens, lesquels ont débouché sur la réalisation de plusieurs milliers de logements tous programmes confondus, mais ils se sont avérés insuffisants pour combler ou du moins atténuer le déficit accusé à ce jour. Cet épineux problème est devenu, circonstances obligent, la hantise des sinistrés, des recasés, des mal-logés et de tous ceux qui sont à l’étroit et qui rêvent de vivre dans un logement spacieux et décent.
Vécue différemment par les populations urbaines, cette situation tant décriée est rendue plus complexe ces dernières décennies, notamment avec le phénomène du terrorisme marqué par un exode rural massif. Des hameaux ont été abandonnés et leurs occupants ont trouvé refuge dans les cités urbaines. Ainsi, la ville de Mascara s’est retrouvée surpeuplée à cause des nouveaux résidents recasés par leurs proches, eux-mêmes mal logés.
Dans les années 80, les autorités locales avaient mis à la disposition des victimes des centres de transit et de recasement, une situation censée être provisoire mais qui a finalement duré dans le temps, car on assistait à des mouvements interminables de recasés qui remplaçaient ceux ayant bénéficié d’un nouveau logement.
Ce n’est qu’à partir de l’an 2000 que l’administration avait décidé de procéder à la démolition de ces centres une fois leurs occupants relogés. Ainsi, tous les nouveaux logements ont été attribués à ces personnes. Une fois cette opération achevée, apparaissait une autre catégorie de citoyens, ceux qui occupaient des logements dans des immeubles menaçant ruine.
Face à ce constat, l’administration a opté pour le même procédé, celui de reloger les familles et de raser les bâtisses, mais les agents chargés de l’exécution de ces actions se sont heurtés à des problèmes liés à l’éclatement de familles, à la réticence des locataires à vouloir quitter les lieux évoquant divers prétextes et au refus des propriétaires de démolir leurs biens, y compris ceux dont les logements étaient partiellement effondrés. Les listes ayant trait aux derniers bénéficiaires de nouveaux logements ont été exclusivement réservées aux victimes de ces cas.
Entre-temps, ce sont d’autres sinistrés qui se sont manifestés et ont été recensés comme tels qui vont certainement bénéficier des nouveaux logements une fois achevés et livrés à l’administration. Ces pratiques ont pour effet de décourager les citoyens de la classe moyenne, car à ce rythme leur rêve est loin de se réaliser. Pourtant, le parc immobilier de la ville de Mascara ne cesse de s’enrichir d’année en année, mais en parallèle le nombre de postulants est en constante hausse.
Quant aux nouveaux projets relatifs à la construction de nouveaux logements tous programmes confondus, dont une partie destinée à ceux qui ont opté pour les formules AADL et LSP, ils ne font guère l’unanimité. Ils sont entravés par les carences administratives, les arrêts des chantiers ou abandonnés, en l’absence de terrains susceptibles de servir d’assiette, même si entre-temps les virtuels postulants ont procédé au versement de leurs quotes-parts au niveau des services financiers.
Les promoteurs sont confrontés à divers problèmes liés à la hausse imprévue des prix des matériaux de construction, à l’absence d’une main-d’œuvre qualifiée et à la prise en charge des dépenses fiscales et parafiscales des ouvriers. Tous ces facteurs constituent un frein au règlement de la crise qui secoue la wilaya de Mascara.
Liberté du 5.2.2020