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Durant deux jours, des jeunes ont décidé de bloquer la route à l’aide de pierres et de pneus brûlés sans être inquiétés, obligeant les voitures à rebrousser chemin et les passagers «à rouler» à pied.

En moins d’un mois, le Grand- Alger aura connu de nombreuses sorties «musclées» de la population, notamment jeune, dans la rue. En effet, tous ceux qui empruntent l’accès Est de la capitale ont de toute évidence constaté ce fait, à leurs dépens, puisqu’à plusieurs reprises cet axe névralgique aura été sérieusement bloqué à la circulation automobile, voire ferroviaire.
Le dernier événement en date est celui de harraga, où des objets hétéroclites et incandescents ont été érigés sur la chaussée, obligeant nécessairement les véhicules et autres autocars à arrêter net leur progression. Aussi, femmes, enfants et vieillards se sont vu contraints de descendre du bus pour rejoindre leurs destinations à pied, à la lueur du soir. Le même scénario s’est déroulé, il n’y a pas longtemps de cela sur l’itinéraire de la nouvelle autoroute menant vers Oran et les principales localités Ouest de la capitale.
Aux premières heures de la matinée et contre toute attente, les usagers de ce tronçon neuf, mais subissant par endroits quelques travaux de restauration, ont arrêté net leur progression suite à des barrages inopinés dressés par des groupuscules qui voulaient se faire entendre des autorités. Ce fut plus exactement à hauteur de la ville de Baraki, dont les habitants de quelques bidonvilles ont déclenché un mouvement soudain de protestation.
Ces deux événements ont été échafaudés sur la base d’une sempiternelle revendication, à savoir le logement. Quelques jours auparavant, ce fut le rail qui a dû essuyer la colère des citoyens de Réghaïa. Ces derniers voulaient empêcher la réalisation d’un centre d’enfouissement technique dans leur localité. Certes, le motif de leur montée au créneau était en rapport avec l’habitat, mais leur mode d’action était on ne peut violent car pénalisant les utilisateurs invétérés du train. Des dizaines d’habitants de Haï El Kerrouche, dans la commune de Réghaïa, ont littéralement arraché le rail, fermant ainsi le trafic ferroviaire entre la capitale et l’est du pays pour s’opposer à un projet d’Etat, c’est-à-dire l’implantation d’une décharge publique contrôlée dans leur localité.
La continuité du service que devait assurer la Sncf (Société nationale du chemin de fer) était alors sérieusement malmenée car les voyageurs ne pouvaient arriver à destination. Le calvaire de ces derniers a duré au moins deux jours. L’on imagine la répercussion d’un tel contretemps sur les routes qui étaient déjà gorgées d’engins et de voitures.
Ce dernier exemple est cité ici pour illustrer un mode de revendication qui semble bien adopté pour monter au créneau, particulièrement pour brandir la fameuse demande d’un, deux, trois ou quatre pièces… Finalement et pour en revenir à ce mode d’action aux fins d’acquérir un logement, son se doit aujourd’hui de s’interroger: «L’Algérie est-elle, à ce point, le pays du fait accompli?» Cette étiquette semble en tout cas fatalement lui coller comme un gant d’année en année. Construire un gourbi et attendre le relogement, brûler des pneumatiques pour avoir un logement, du travail, de l’eau, du goudron… sont des formules qui semblent payer pour une certaine catégorie de gens. Une catégorie seulement. Car l’autre masse, bien silencieuse, elle, ne s’est jamais adonnée à ce sport, hélas, bien national. Elle est majoritairement composée d’honnêtes citoyens, des cols blancs en majorité, qui n’osent pas ériger des taudis aux abords des oueds mais qui laissent pourtant toute une vie de salaires dans les murs d’appartements qu’ils louent au prix d’or.
Ces hommes et ces femmes bien humbles mais fiers n’ont pas de semi-remorques, ou de carrosses stationnés au parvis d’un taudis de fortune. Ils luttent cependant pour assurer à leur progéniture une vie et une scolarité décentes. Ils ne sont ni de richissimes «businessman» pour prétendre à un toit frôlant le milliard et plus, ni des connaisseurs en matière de campements improvisés, aptes à être manipulés à la faveur d’une possible opération de relogement, aussi importante et grandiose soit-elle. Ils sont, nonobstant, les oubliés du ministère de l’Habitat. Ceux-là ne font pas de grabuge, se contentant d’être d’honnêtes citoyens…
Dans le meilleur des cas, ils souscrivent au programme LPP, sans faire de… vagues. Dans leur fort intérieur ils se désolent de l’érosion de l’autorité publique, dont le pouvoir disciplinant et sécurisant aura subi, pour diverses raisons, l´érosion de ses valeurs symboliques. Seule une justice implacable dans la distribution et le partage des biens pourra leur rendre espoir.

 

Source : L’expression du Mercredi 08 Janvier 2014

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