Si en Europe, la formule «Logement chez l’habitant» représente un fait touristique de crise, en Algérie, le «Séjour chez l’habitant» reste plutôt un phénomène social en nette croissance. La demande ne cesse de croître, encourageant les habitants des zones côtières à proposer leur demeure durant la saison estivale.
Les émigrés, eux, restent la cible la plus recherchée dans le marché d’un produit touristique pour le moins informel. A Skikda, cette tendance connaît une fulgurante croissance.
Limitée, il y a une dizaine d’années aux propriétaires de bungalows implantés à moins de 500 m de la plage Ben M’hidi, la location à la nuitée a fini aujourd’hui par connaître une fulgurante expansion spatiale. Des logements sont proposés près des plages mais aussi dans les cités populaires les plus reculées. Ce phénomène social ne concerne pas uniquement la ville de Skikda, mais touche aussi les villes de Collo, à l’Est et de la Marsa à l’Ouest.
La nuit vaut ses briques
«On propose des logements de haut standing donnant sur la mer, des villas ou même des F2 dans des cités-dortoirs de la ville», rapporte Mohamed, un jeune Skikdi reconverti en courtier estival. Il poursuit : «Mais cela ne semble pas trop influer sur les prix qui restent très élevés. Ils vont de 5 000 à 15 000 DA la nuit.» Mohamed explique que cette variation des tarifs obéit d’abord à la proximité de la mer.
Le prix d’une nuitée dans un F2 proche des plages de la ville atteint parfois plus du double du tarif d’un F4 dans des cités de banlieue. «Je trouve que c’est illogique», estime-t-il. Ainsi, pour disposer d’un chalet à Ben M’hidi ou d’une chambre donnant sur le port de Stora, il vous faudra réserver au moins au mois de juin.
Vous serez même appelés à verser des arrhes. Chaque propriétaire affiche le prix qu’il veut. Il sait que tôt ou tard, les retardataires finiront bien par frapper à sa porte. A Ben M’hidi, à moins de 15 minutes de route à l’est de Skikda, la mer est presque à portée de la main.
Même si la verdure d’antan n’existe plus et même si le béton a tout effacé, cela n’influe nullement sur les affaires d’été. Ici, les chalets et autres villas se louent les yeux fermés. «Les gens louent tout et n’importe quoi», avance Mohamed, le guide de fortune, en frappant à la porte d’un propriétaire d’une villa encore en construction. Ce dernier propose un F3 «équipé», selon lui.
Tout y respire le ciment pourtant. Les chambres sont encore en travaux et aucune ne dispose de boiserie ou fenêtre. Quelques matelas, sans couverture, gisent sur le sol. Dans la cuisine, il n’y a qu’un réchaud. «Ces pièces viennent tout juste d’être libérées.
Elles sont vacantes pour une semaine. Vous devez les libérer après, car j’attends d’autres clients. Si vous êtes d’accord, vous me versez des arrhes», lance le propriétaire avec une grande désinvolture. Et le prix ? 7000 DA la nuit pour un logement encore en chantier. Mohamed dit que ce monsieur pourrait même revoir son prix à la hausse et il trouvera toujours preneur. «Il profite des entrées de cette location pour achever la construction de sa villa», ajoute Mohamed, comme pour justifier le tarif exigé.
La toile et ses Euros
Néanmoins, pour prétendre disposer d’un gîte confortable et tout près de la mer, il faudra majorer les prix qui, en moyenne, tournent autour d’un million de centimes la nuit. Parfois plus. Certains propriétaires refusent cependant de louer leur villa en tant qu’entité et préfèrent plutôt proposer ses chambres à plusieurs clients en gardant la cuisine comme lieu commun. «Ça rapporte gros. Imaginez une villa de 6 pièces seulement qu’on loue à 7000 ou 8000 DA l’unité», rapporte le jeune courtier d’été.
D’autres, et ils sont plus nombreux, préfèrent avoir affaire à un seul client. Conscients de l’importance de la demande, ces propriétaires évitent le courtage traditionnel et font carrément dans le marketing via la Toile. Des sites spécialisés regorgent d’offres localisées à Skikda et les prix sont affichés…en euros. On y propose des maisons à 50 euros la nuit ou des bungalows toutes options à plus de 80 euros. Pour séduire les clients potentiels, l’offre est toujours accompagnée de photos du bungalow ou de la villa à louer.
En fins démarcheurs, les propriétaires rajoutent même d’autres options, comme le parking gardé ou l’indiscutable connexion Wifi. D’autres proposent même des chalets avec piscine, ou des séjours avec une salle de jeux. Chacun y va de sa petite trouvaille.
Tout le monde gagne dans l’affaire
«Les prix plus ou moins exorbitants ne sont pas si excessifs que ça», lance Mohamed, en prenant attache avec une famille venue de Biskra et qui loue un chalet, toujours à Ben M’hidi. Le père de famille prend la parole : «C’est la quatrième saison qu’on séjourne dans ce chalet. Nous y passons quinze jours, à raison d’un million de centimes la nuitée. Je ne me plains pas, au contraire. Nous sommes huit personnes à profiter de ce lieu et si j’avais eu à opter pour un hôtel, j’aurais laissé toutes mes économies. En plus, cette formule nous permet de disposer de plus de tranquillité et aussi d’intimité.
C’est ce que nous cherchons et l’année prochaine nous y reviendrons encore.» Ce que dit ce père de famille est partagé généralement par tous ceux qui optent pour cette formule. Mathématiquement, cette option reste bénéfique et pour le propriétaire et pour ses clients. Les familles nombreuses surtout sont les plus gagnantes dans l’affaire en disposant d’un pied-à-terre près de la mer.
Source: ElWatan le 11-08-2016