Cette cité constituée de belles maisons de maître vendues par la CNEP à partir de 2005, avait vocation d‘être un quartier résidentiel, avec de belles allées, une clôture subtile, un jardin et des aires de jeu pour les enfants.
Rien n’en est aujourd’hui, a-t-on constaté. «L’école primaire est cernée de poubelles nauséabondes. Le danger guette nos enfants. Les dealers squattent un petit espace vert mitoyen», dénonce le comité du quartier. En effet, l’espace vert se trouvant en face de l’école du 20 Août est à l’abandon : arbres sans élagage, pelouse en broussaille et des détritus partout. Ce jardin est un point noir que les habitants peinent à réhabiliter.
«Ce ne sont que des buissons dans une enceinte squattée dès la tombée de la nuit par des jeunes délinquants qui y consomment de la drogue. Nous interdisons aux enfants d’y jouer car ils risquent de se blesser. Regardez les bouteilles de verre, les canettes de bière et ces blocs de pierre sur lesquelles s’assoient les jeunes désœuvrés», commente Ilies, un habitant rencontré sur place. Interrogé sur les initiatives des citoyens pour arranger les choses, notre interlocuteur déclare : «Nous ne pouvons pas nous occuper de tout. Nous nous sommes plaints auprès des responsables de la commune, mais rien n’est fait. On nous a dit d’attendre.» En plus de cet espace vert, les rues sont également complètement délabrées avec des nids-de-poules et des tranchées mal remblayées après des travaux d’électricité, d’AEP ou d’assainissement.
Les habitants se rappellent de l’interdiction de circulation intramuros des gros engins et des camions. «Dans le temps, les camions de deux tonnes n’avaient pas le droit d’entrer ici. Aujourd’hui, il y a même des semi-remorques qui arpentent ces rues exigües provoquant des bouchons, une pollution sonore et environnementale et endommageant la chaussée», regrette un autre habitant.
Les avaloirs d’eaux pluviales sont obstrués par les ordures et ont besoin de curage urgent. M. Ilies appréhende la saison des pluies : «Dès les premières averses, ces rues sont complètement inondées comme s’il s’agissait d’un oued ressuscité. Les enfants ont du mal à se déplacer et, souvent, ils s’absentent de l’école. Sinon, ce sont les parents qui ratent une journée de travail pour les accompagner. Il faut un curage régulier des avaloirs… Pourquoi ne pas penser à de nouvelles installations ?»
Pour expliquer cet abandon – sans le justifier – nous apprendrons que la cité a été construite dans les années 1990 par la CNEP mais que le terrain faisait l’objet d’un litige entre la commune d’El Kerma et ladite banque. Aujourd’hui, les habitants n’ont toujours pas d’actes de propriété en raison de ce conflit. Cet atermoiement relègue la question du cadre de vie au second plan car certains habitants semblent n’attendre qu’un papier pour se sentir chez eux, ou du moins vendre leur maisons. «Je suis allé voir la banque pour obtenir mon acte de propriété mais j’attends toujours. On m’a expliqué que le conflit sur le foncier n’est pas tranché. Il faut croire que tous les habitants n’ont pas fini de payer leur maisons et donc, cette situation les arrange un peu.
Ou bien, ils ne se sentent pas concernés. D’ailleurs, la plupart compte vendre une fois les actes de propriété obtenus», explique M. Ilies. Cet état de fait semble ajouter de l’amertume au marasme des habitants, surtout les enfants. Mais est-ce que ça explique le laisser-aller ? Pris au piège bureaucratique, ces citoyens interpellent les autorités locales pour prendre en charge leurs doléances afin de garantir un meilleur cadre de vie à leurs enfants qui sont les premières victimes de cet abandon manifeste. Et bien que l’initiative citoyenne fasse également défaut, le rôle des services locaux reste capital dans ce cas-là.
Il y a lieu de souligner que la majorité des rues et quartiers d’El Kerma sont dégradés, qu’il s’agisse de la voirie ou des espaces verts. Cette commune a complètement perdu son cachet. En effet, il n’y a pas que les 140 logements : El Kerma a complètement changé en pire. C’était un beau petit village avec de belles maisons de maître, des jardins, des places, des terrasses. Aujourd’hui, des immeubles sans identité ont été érigés et les séquelles des chantiers infinis fardent encore le décor.
Source: Elwatan le 04-10-2016